Au royaume de Torgnol vit une communauté de barbares placés sous le haut commandement d'un roi. Le fils de ce roi n'est autre que Krän, probablement le plus bel exemple de classicisme barbare qui soit. Krän a en effet tout du fils spirituel de Conan : une stature enviable, une musculature imposante, une coupe tendance heavy metal et une fort jolie hache. Krän n'est cependant pas un héros. Il s'en défend. Les héros sont des idiots qui passent leur vie à affronter des monstres pour un peu d'or (ou pire, pour sauver des gens). Non, Krän est un barbare qui trouve la plénitude dans un art ancestral pratiqué avec maîtrise et passion : la baston. Coureur de jupons, fort-en-gueule, querelleur, joueur aussi, le barbare n'est pas une lumière et la plupart de ses aventures sont d'ailleurs le fruit de ses erreurs. 

Krän est flanqué d'un compagnon dans la plus pure tradition des "sidekicks" : Kunu. Kunu est un nain dont on ne sait pas vraiment s'il est un humain atteint de nanisme ou un vrai nain maigrichon. Son nom lui vient du fait que son pagne a du mal à lui couvrir l'arrière-train. Bien qu'il soit légèrement plus malin que son barbare attitré, Kunu est le guignol de service, celui à qui tous les malheurs arrivent et que Krän ira sauver en dernier recours. D'autres personnages récurrents font leur apparition dans la série, comme le garou apprivoisé du barbare (le garou est une horrible boule de poils qui se transforme en géant sanguinaire les nuits de pleine lune), le magicien aveugle Naikicoul, Felony la sorcière sado-maso, la Mort, etc. 

Actuellement, la série compte dix volumes normaux et 4 volumes dans sa série connexe : Krän - Univers. Dans la série normale, les aventures du barbare se suivent comme une seule et même saga (il convient donc de les lire dans l'ordre). Dans "Univers", l'auteur nous propose plutôt des gags en une page. Gags, oui, car le fond de commerce de la série, c'est le calembour à deux balles. On passe du cliché rôlistique de base aux anachronismes hilarants avec un certain style. On apprécie tout particulièrement les dialogues lors des combats, pourraves et loufoques à souhait. Pourtant, on a un peu l'impression qu'on se lasse un peu vite des personnages et des aventures proposées par le scénariste Eric Hérenguel. Un humour qui s'apprécie donc à petite dose.

Le dessin est assez inégal mais répond aux impératifs du genre : femmes sexy, mâles brutaux et tronches tordantes pour les personnages secondaires. Le monde de Krän n'a cependant rien de très original et c'est peut-être cela qui finit par lasser : il manque de profondeur. On sent bien vite que les histoires ne sont qu'un prétexte pour mettre en scène le barbare, qu'elles ne se suffisent pas à elles-mêmes et laissent donc souvent le lecteur sur sa faim. Mais on ne peut pas ne pas aimer Krän si l'on est un fervent admirateur du héros de Robert E. Howard...