• BD - AmianteParmi les grandes sagas épiques de la fantasy à la française en bande dessinée, Amiante semble la plus directement inspirée de ces univers incongrus et loufoques nés de l'esprit enfiévré de quelques maîtres de jeu nourris aux clichés dès leur plus jeune âge. Le monde dans lequel se déroulera l'histoire s'appelle la Planète Rousse. Autrefois, elle était habitée par une race de puissants guerriers et de redoutables magiciens appelés les Sarcoptes. Lassés de leur tyrannie, les autres peuples se rebellèrent contre eux et les forcèrent à l'exil dans le Gouffre des 120 Ténèbres, dont ils scellèrent ensuite les portes. Les humains et d'autres races héritèrent alors du monde et oublièrent la guerre et les Sarcoptes

    Dans la cité de Pradishar où règne le Prince-Jamais-Vu, une jeune mercenaire borgne et sexy, Amiante, va se faire engager par un mystérieux magicien, Mordecaï, afin de lui servir de garde du corps dans une quête mystique. Elle fera également engager une sorte de "peau-verte" du nom de Fafnir, pour qui elle a un faible. Le trio ainsi formé affrontera divers dangers et explorera des lieux improbables afin de mettre la main sur de puissants artefacts, en fonction des directives du magicien. Le volume que je possède regroupe les trois premiers tomes de la série sur les quatre parus et je n'ai pas eu l'occasion de lire la fin de l'histoire. Mais j'en sais assez pour me faire une opinion.

    Commençons par les dessins de Patrick Lemordan (à qui l'on doit une couverture de Casus Belli et quelques illustrations dans les Chroniques d'Autres-Mondes). Ceux-ci se situent à mi-chemin entre le réalisme et le cartoon et se prêtent donc assez bien à une fresque de fantasy. Le scénario de Philippe Caza est d'un classicisme à toute épreuve dans son déroulement, même s'il part d'une situation intéressante (une race ancienne refoulée sous terre et nourrissant la sourde menace d'un retour vengeur) et propose quelques surprises à ne pas négliger (la "main" du grand méchant de l'histoire implantée dans le corps du magicien pour le contrôler) pour un MJ inspiré...  Quelques regrets, toutefois : les tentatives humoristiques des auteurs... Que ce soit la vulgarité inutile de l'héroïne, les allusions sexuelles incessantes, les incantations "jeu de mot" de Mordecaï... Cela transpire l'adolescence boutonneuse à plein nez et ne semble pas devoir s'adresser à un public plus "adulte". 

    Au final, nous avons avec cette série un univers de fantasy à la limite du parodique, sans grande cohérence, sans réelle profondeur, des personnages factices qui sentent le mauvais pré-tiré et une intrigue digne des plus mauvaises campagnes de D&D. Amiante ne m'a pas franchement emballé, vous l'aurez compris, mais tout n'y est pas pour autant à jeter et chacun y trouvera sans doute de quoi meubler les moments creux de sa propre campagne... 


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  • BD - Le cycle d'OstruceL'histoire du cycle d'Ostruce se déroule dans une Russie uchronique et steampunk, simplement baptisée l'Empire. La révolution industrielle et la magie sont les deux mamelles d'un pays dirigé par un vieux dragon (ce n'est pas un titre de noblesse quelconque, c'est vraiment un ver). Le dragon est protégé par des vierges guerrières appelées les drakhs. Son règne affame les populations et sème les graines d'une révolution représentée par un groupe de pression appelé "les Rouges". Les conservateurs cherchant à garder la main-mise sur le pouvoir se font appeler, eux, le Parti Noir. Au début du premier volume de la série (qui en compte quatre), la révolution gagne le palais draconique de Saint-Atanov, la capitale de l'Empire. Le vieux dragon vient d'être assassiné et ses œufs, ses héritiers, détruits. Tous, sauf un. 

    Très vite, on comprend que l'une des drakhs protectrices a tué l'Empereur, devenu fou, et a pris la fuite avec le dernier œuf afin de préserver la lignée impériale. Sur sa route, elle attire dans son sillage une pauvre femme battue, obligée de voler pour le compte de son mari et de son frère, Katiana. Une relation inégalitaire va s'installer entre les deux femmes, mais Ajjer, la drakh, est poursuivie ! D'un côté, les révolutionnaires veulent retrouver l’œuf afin de mettre un terme à la lignée du défunt dragon. De l'autre, une autre drakh, persuadée qu'Ajjer a volé l’œuf à des fins personnelles, veut rétablir un dragon sur le trône impérial. D'autres personnages secondaires viendront enrichir les pages de cette saga glaciale dans un monde en plein bouleversement. 

    Situer l'action dans une Russie fantasmée joue beaucoup dans l'attrait esthétique de la série sous le crayon de Christophe Dubois. Les espaces glacés, les grandes étendues désertiques, les passerelles avec l'histoire réelle et les superstitions d'un peuple longtemps maintenu dans l'ignorance sont un terreau fertile pour l'imaginaire. La magie est bien présente, sous la forme de rituels et de pouvoirs spéciaux. Le commissaire du peuple qui poursuit Ajjer, par exemple, dispose d'une magie sibérienne et peut geler quiconque d'un simple regard. Le côté steampunk tient plus à l'époque (1894) qu'aux appareils, mais on y retrouve quelques éléments typiques comme les gardes impériaux en uniformes et masques à gaz et les machines volantes comme le vaisseau-sorcière, Héria, dans le deuxième volume.

    La fantasy y a également sa place : on s'y bat plus souvent à l'épée qu'avec des armes à feu, pourtant bien présentes, il y a la magie et les dragons, mais aussi des races classiques comme les ogres, les elkins (un croisement entre les inuits, les elfes sauvages et les pandas) et autres joyeusetés. Le scénario de Nicolas Pona tient la route au moins sur les deux premiers épisodes (je n'ai pas les deux derniers), même s'il y a immanquablement des faiblesses ou des zones d'ombre là où on aurait envie d'en savoir plus, mais il faut aussi laisser place à l'imagination et on comblera sans mal ces failles. C'est en tout cas une belle découverte parue aux éditions du Lombard, dans la collection Portail


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